Avant toi

Je ne me souviens plus vraiment comment c'était.
Enfin si, je me souviens. On voyageait, on sortait, on se couchait tard et on regardait "encore un dernier épisode".
Et puis, on parlait déjà de toi.

Te voilà dans nos vies, te voilà dans nos bras et nous nous regardons ton père et moi et nous nous demandons "Et maintenant?".

Et maintenant nous voilà trois, nous voilà quatre, nous voilà cinq, nous voilà six et toujours toi, loin devant, le grand pas si grand à qui on demande trop souvent de l'être.
Et toi voilà toi, mon Grand de 7 ans, qui pleure pour avoir son jogging le matin, parce que les autres pantalons, ça te serre. Te voilà toi, dans le fauteuil démesurément grand de ton père, sous un plaid, en slip, avec des piles de BD à déguster. Et tout ce que tu fais sans nous.

Tu as 7 ans, l'âge de raison dit-on, espérons qu'elle ne dirige pas trop ta vie mon grand.
Garde ton humour, même s'il vaut mieux éviter le second degré toute la journée, tu le sais, quand tu compares une dame à une verrue plantaire et que tu lui dis, c'est moi qui manque de m'étouffer.

Continue de nous dire les choses, que le soir tu as la trouille en imaginant ce que nous sommes, ce qui nous constitue et pourquoi nous sommes là. Continue de penser et d'avancer, nous serons là, la main tendue, pour t'aider. Nous serons là.

Je ne sais plus vraiment comme c'était sans toi et même tes premiers moments parfois m'échappent. Il me reste ce qui restera toujours.
Ton premier pyjama et la façon dont tu appelais ton frère "Le Tout Petit", tes premiers pas dans ce couloir étroit aux dalles auto-adhésives posées n'importe comment par ton père (mais si, c'est très facile à poser).
Tes colères et tes sourires, tes dents écartées et cette façon que tu as de prononcer les mots.

Mon grand.
Sept ans que tu nous as donné envie d'être une famille nombreuse, on aurait pu s'arrêter à toi (et mon dieu ce qu'on dormirait mieux) mais il suffit de vous regarder ensemble pour savoir que ce que vous vivez est à vous pour toujours, est à toi pour toujours.
Toi, l'aîné, qui essuie les plâtres, qui a les vêtements neufs, qui a le droit de lire un peu plus longtemps que les autres le soir (mais pas trop), qui a mangé des sushis ce midi avec tes deux parents au lieu d'aller à la cantine.

Je me dis parfois que je fais pas assez, que je devrais prendre plus le temps de jouer avec toi à la bataille navale ou au jeu de 7 familles puisque manifestement ton frère et tes sœurs ne sont pas encore assez grands pour y jouer. Je me dis aussi que tu n'as rien demandé à cette famille nombreuse (même s'il me semble que tu ne pourrais plus t'en passer).

Mon grand.
Sept ans et cette impression que tout est passé si vite. Qu'on a mis de côté tous les mauvais moments pour ne garder que ces instants de vie précieux.
Sept ans et c'est un peu de moi, un peu de lui que je retrouve chaque jour en toi, comme pour nous rappeler à notre propre enfance encore un moment.

Sept ans aujourd'hui et, en toi, beaucoup de ce que tu deviendras, indépendamment de ce que nous sommes devenus nous. Une petite personne, plus si petite, qui chausse du 31 déjà et qui se demande à partir de quand on dépasse sa maman.

Une petite personne que j'élève du mieux que je peux, que nous élevons du mieux que nous pouvons, qui commence à comprendre le pourquoi du comment, qui commence à rire de lui et à prendre du recul, une petite personne qui me soutient que "la vie c'est pas grand chose mais puisqu'on est là autant la vivre en rigolant".

Mon grand.

oui et je vous ferai aussi un petit billet anniversaire et gâteau arc-en-ciel qui déchire