Les enfants sont gentils

Hier midi, je lui avais promis un petit bonbon "pour se donner du courage" comme il dit, astuce de maman pour retourner à l'école l'après-midi quand la pause méridienne est difficile à interrompre.
Ce n'est pas tous les jours mais de temps en temps, quand on "jouait bien maman" et quand on préférerait rester ici....

On grignote un Carambar et on retrouve un peu d'entrain.

Hier midi, sa soeur s'étant  coincé le doigt très fort dans le portail de l'entrée en faisant Batmine (la copine de Batman), Moyen Nain devait retourner tout seul à l'école. Il a un peu pleuré puisque Micronaine allait chez le radiologue (et allait clairement avoir un petit cadeau remonte-moral en sortant).
Je lui ai promis un petit bonbon pour se donner du courage et puis nous l'avons oublié ce bonbon parce qu'il fallait mettre les baskets-vite vite- et retrouver les clés de la maison que Nano avait planqué sous le canapé.

Il fallait fermer les portes et prendre la laisse du chien, installer Nano dans la poussette malgré ses hurlements signifiant son aptitude à la marche (bourrée mais à la marche quand même).
Il fallait descendre et marcher jusqu'à l'école et c'est en chemin qu'il s'est arrêté net.

- On a oublié le Carambar. Il faut y retourner.
- Non, on ne peut plus maintenant sinon on va être VRAIMENT en retard.

Devant la mine déconfite du nain, j'ai proposé une alternative plutôt réjouissante.

- Si tu veux, quand je viens te chercher, j'en ramène deux. Deux carambars.
- Des grands? (Il est malin le bougre).
- Oui, des grands.
- Ok alors.

Je rentre de l'école, je couche Nano et je m'installe pour travailler.
Je lance une lessive entre deux articles, j'étends le linge et je ramasse des dinosaures en vadrouille dans mon couloir.
J'écris avec un oeil sur l'horloge et je me note "Carambar" sur un post-it.
On ne sait jamais, avec la fatigue et mes neurones défaillants, je pourrais oublier.
Alors que lui n'oubliera pas.


15h30, j'embarque ma Micronaine (qui n'a rien de cassé mais deux figurines Reine des Neiges pour compenser sa douleur et son doigt gonflé) et Nano qui se réveille d'excellente humeur à l'idée d'aller faire la tournée des écoles sans avoir englouti son biberon.
J'ouvre mon pot à bonbons et je pioche deux GRANDS Carambars à la fraise. Dans la poche.


15h45, nous sommes devant l'école et je vois la tête de Moyen Nain derrière la vitre. Il sort en courant. Il attend. Je sors les deux carambars de ma poche et je lui tends. Il est ravi.
Il déballe le premier, concentré, tandis que nous sommes toujours devant l'école. Il me tend le papier chiffonné et un peu déchiré, coupant comme toujours une des deux blagues en deux (souvent la moins nulle).

- Tu me racontes la blague?
Comme toujours, je la raconte en tentant d'expliquer le jeu de mot incompréhensible pour un enfant de cinq ans. Il rit tout de même. Micronaine fait pareil, on ne sait jamais.

Devant nous passent les derniers parents, ceux que la maîtresse a gardé quelques minutes de plus.
D'ailleurs j'entends que "M. n'a pas passé une très bonne journée". M. pleure en partant de l'école, en tenant la main de sa maman.

M. c'était la copine de Moyen Nain chez les Moyens. Ils se voient moins puiqu'il est passé chez les grands mais il l'aime beaucoup quand même.

Et quand M. passe en pleurant devant nous, Moyen Nain a l'air ennuyé.
On marche un peu et puis il se retourne vers moi.

- Je peux lui donner mon autre Carambar Maman?

Il n'attends pas la réponse et il court vers elle.
Je les vois de loin.
Il lui tend et elle le prend, en essuyant ses larmes d'un revers de manche.
Sa maman dit merci, merci beaucoup.
Il sourit et me regarde d'un air de dire "tu vois maman".
Et il revient vers moi, comme si de rien.
Elle n'a plus de larmes.

Les miennes ne sont pas loin.

Les enfants sont gentils.

Superbe livre dont je parle ici

Explication a posteriori (les enfants sont des pourris) :  Moyen Nain, ne souhaitant pas manger DEUX Carambars à la fraise (alors qu'il en existe plein d'autres parfums bien plus appétissants), a donc préféré offrir son Carambar à sa copine et en manger un autre arrivé à la maison.
Mais tout de même.
J'ai souri.