Depuis hier, j'ai mal au ventre et depuis hier, je ne saurais dire pourquoi, nous qui vivons dans un monde où ces atrocités ont lieu tous les jours, partout.
Je pourrais arguer que cette fois ci c'est différent, c'est près de chez moi, nous les connaissions un peu, mais non, cette fois ci c'est la même chose.
C'est l'homme qui assassine l'homme. Deux types qui rentrent dans un immeuble et qui tuent des gens à petites lunettes, assis autour d'une table, qui devaient ricaner et prendre un café.
L'homme.
Celui qui n'a rien fait que de dire, que d'écrire, que de prendre un crayon et de faire une bonne blague. Celui qui possède finalement le plus juste des pouvoirs, celui de dénoncer, celui de rire.
Je suis triste, profondément et sincèrement triste.
Ils ont tué ceux qui disaient véritablement les choses, pas cette presse détestable qui amuse le Français,entre midi et deux à coup de jeux débilisants, pas celle qui effraie les Français le soir à coup de reportages racoleurs.
Je suis colère aussi pour ça. Pour cette presse qui laisse s'installer en France tout ce que j'abhorre, la peu de l'autre. La peur des autres.
Et puis, finalement, de tout ça...
Je vois les gens. Ce besoin d'être ensemble, unis pour la même chose.
Les bougies, les mots, les mains serrées, les yeux brillants et les voix qui se brisent.
Ceux qui répètent en boucle, "je suis Charlie", nous le sommes tous.
Cet élan qui pousse les gens à se retrouver, à se mettre debout, à scander Liberté. A parler d'immortalité.
C'est en ça que je veux croire. C'est en cet homme là.
C'est la raison pour laquelle j'ai des enfants, c'est la raison pour laquelle je suis.
Pour cet homme là.
Et puis.
Je vois mes enfants.
Je ne me suis même pas posé la question de leur dire ou pas.
Je leur ai dit.
Nous avons le droit de parler, nous avons le droit d'écrire, nous avons le droit de dessiner, de rire et ce droit là, personne ne peut nous l'ôter.
Je leur ai dit, loin des écrans, loin de la radio et des flots de mots terribles.
Je leur ai dit que la bonté avait été assassinée.
Et que nous étions tristes. Mais que rien ne nous empêcherait de parler, d'écrire ou de dessiner.
Parce que c'est tout ce qui nous reste, parfois. Parce que d'autres se sont battu pour que nous puissions le faire.
crédit JOEL SAGET / AFP |
Ce soir, avec les enfants, nous irons avec les autres. Allumer une bougie, juste être ensemble.
Ils n'ont pas tout compris, je pense. Mais ils ont été tristes. Ils n'ont pas tout compris et tant mieux, ils ont été rassurés et effarés, nous avons ensuite changé de sujet, nous avons même ri, les enfants ont cette faculté là, de passer à autre chose en un souffle.
Faculté que nous n'avons pas.
Ce soir, avec les enfants, nous irons avec les autres.
Parce que je leur répète tous les jours qu'il faut avancer et croire en ce que nous sommes.
Ce soir, avec les enfants, nous irons avec les autres, larmes et émotions.
J'y tiens.
Parce qu'il faut continuer de dire.
Parce qu'il faut continuer de rire.
Je ne voulais pas écrire hier non plus...et j'en ressenti le besoin aussi ce matin....parce que cet élan humain je veux y croire aussi....que nous nous devons de vivre, de dire, de rire et nous devons le faire debout.
RépondreSupprimerOui il faut continuer. C'est la seule réponse à donner... tous. Il faut continuer.
RépondreSupprimerje suis Charlie. Nous sommes Charlie. Encore et pour toujours.
RépondreSupprimerMerci pour ces mots justes, Marie. Nous sommes Charlie.
RépondreSupprimerNos yeux auront tellement de mal à sécher...
RépondreSupprimerMoi aussi, j'ai tout raconté à mes enfants. Parce qu'il le fallait.
Merci pour tes mots.
Je leur ai dit aussi. Et qu'il ne fallait pas avoir peur. Et que cette liberté était un droit absolu que la violence n'éteindra pas.
RépondreSupprimerOui et effectivement, si il y a une seule chose de positive à retenir de cette barbarie...C'est l'élan de tous ses anonymes, la france qui s'insurge comme ça n'était pas arrivé depuis si longtemps...
RépondreSupprimerNous aussi avons essayé d'expliquer avec nos mots, à nos deux plus grands, même si j'avoue qu'expliquer des choses qui nous semblent impossible est bien difficile... qu'ils ont compris à leur façon je pense, même si je vois dans leurs yeux qu'ils ne peuvent pas imaginer que les hommes sont capables d'aller aussi loin :(
Le rassemblement à Rennes avait eu lieu hier et je n'ai pas pu m'y rendre avec les mioches... trop sous le choc et je ne leur avait rien dit...
RépondreSupprimerj'ai trouvé le courage de leur dire ce matin, un peu plus à froid... Leur dire la diversité des religions, les fanatiques, la liberté d'expression, que ces dessinateurs/journalistes étaient des héros et surtout, surtout, que malgré la colère, la violence n'est jamais la bonne réponse...
J'espère juste avoir réussi à leur faire comprendre... J'aimerais qu'il y ait autre chose ce soir ou demain : là je les emmènerai, qu'ils voient la solidarité et la fraternité au service de l'égalité et de la liberté !
Merci Marie ... ton message me touche beaucoup.
RépondreSupprimerJ'admire le courage que tu as eu pour parler directement de cet attentat à tes enfants. Peut-être que je fais l'autruche, mais je n'ai aucune intention d'en parler aux miens (4 ans et 7 ans). Pour la petite de 4 ans, la question ne se pose même pas, d'ailleurs ils n'ont pas fait la minute de silence dans son école maternelle, et c'est tant mieux. Quant à l'aînée, elle sait qu'il y a des gens "fous et très méchants" qui font du mal aux autres, y compris en mettant des bombes : c'est comme ça que je lui ai expliqués les contrôles de sécurité dans les aéroports (nous prenons souvent l'avion) et la présence de patrouilles "policier+soldat" dans les gares parisiennes. Si elle m'en parle je répondrai, mais je ne lui en parlerai pas spontanément, "à chaud". C'est un choix, que mon mari partage - car nous en avons parlé plusieurs fois ensemble.
RépondreSupprimerQuel choc. Hier soir je tentais d'expliquer à mon fils de 3 ans pourquoi j'étais triste, et tout le monde: parce qu'il y avait des méchants qui avaient tués des journalistes. Il m'a posé mille questions, et encore et encore et puis, au moment de se coucher il voulait savoir si j'étais encore triste. Pour qu'il fasse de beaux rêves je lui ait dit "ça va mieux" et il a levé ses petits yeux vers moi: "ça y est, ils ne sont plus morts les journalistes qui dessinent des histoires?"
RépondreSupprimerPour ceux et celles qui veulent en parler à leurs enfants sans trop savoir comment s'y prendre "Le petit quotidien " met à disposition de tous un numéro spécial http://www.playbacpresse.fr/documents/charlie/lpq_charlie.pdf
RépondreSupprimerIl y a aussi pour les plus grands http://www.playbacpresse.fr/documents/charlie/actu_charlie.pdf (Merci Coccinelle-La boutique). Merci Marie pour ces mots. Pour la 1ère fois je n'ai pas pu retenir mes larmes devant mon ado. L'aider à comprendre l'incompréhensible, pas facile. Nous irons dimanche manifester notre solidarité c'est important.
RépondreSupprimerMerci Marie d'avoir enfin fait sortir les larmes que je retiens depuis hier. Ici, mon compagnon, copain de Charb, en colère comme je ne l'ai jamais vu. Bébé trop petite pour comprendre (14 mois) mais qui ressent notre deuil, et la peur de sa nounou, kabyle d'Algérie, qui ce matin avait peur que nous ne la lui amenions pas... Et moi qui me demande dans quel monde nous allons faire grandir nos enfants... Merci...
RépondreSupprimerj'ai les larmes aux yeux depuis mercredi .. il y a des émissions très dignes - c à vous france 5 par exemple- qui aident à ne pas se sentir seul , nous partageons l'immense chagrin de Patrick Pelloux .. des textes comme les vôtres sont plein d'émotion .. Soyons tous unis . j'irai au rassemblement à Tours dimanche .
RépondreSupprimerVu sur Facebook:
RépondreSupprimerOn devrait pouvoir comprendre...
Ce matin dans la voiture radio allumée.
- Maman tout le monde parle de Charlie...
- Oui ma puce...
- Pourquoi ?
... 3 options....
... 1- Expliquer froidement un massacre à une môme de 4 ans, je ne peux pas.
....2 - Eluder la question, je ne peux pas.
;;;;3 - Allez ma grande, improvise...
3 donc :
- Charlie est un journal dans lequel plusieurs personnes dessinaient. Elles faisaient des dessins pour faire rire les gens, tiens, comme les dessins de ton calendrier où tu enlèves une page par jour pour voir le dessin suivant.
Attends, je cherche un autre exemple parce que Vermot c'est pas exactement ça. Toi tu aimes dessiner des soleils...
- Oui.
- C'est beau un soleil ?
- Oui
- Eh bien, ces gens qui dessinaient, ils disaient, "Ok, il est bien beau votre soleil jaune, mais on en a marre que tout le monde le dessine jaune avec des rayons. Nous on le dessine rouge, vert, bleu, avec des boutons et même avec des poils partout tiens !
- (Rires) Ah bon ? :)))
- Oui et même avec des grosses fesses !
- (Re rire)
- Eh bien, si tu veux dessiner un soleil comme ça, et même avec des boutons partout, si tu veux dessiner un soleil ridicule, un soleil vulgaire qui rote et qui pète, juste pour faire rire, et même si ça choque d'autres personnes, eh bien tu as le droit, ça s'appelle la liberté d'expression.
Alors pour répondre à ta question... Tout le monde parle de Charlie aujourd'hui... parce qu'hier, des imbéciles ont dit : "Le soleil c'est jaune, et pas autrement, on ne se moque pas du soleil, on veut interdire tous les dessins qui ne seront pas comme ça". Ils sont entrés dans une colère noire, et ont voulu tuer Charlie.
Ils lui ont fait énormément de mal.
C'est pour ça qu'aujourd'hui tout le monde est triste, et en colère, et se rassemble pour dire : en France, tout le monde a le droit de dessiner le soleil comme il veut et on veut que ça dure. Est-ce que tu comprends ?
- Je crois que oui.
Si au prochain dessin en classe, je suis convoquée par l'Instit', j'expliquerai.
Pas simple l'impro
J'adore l'impro du soleil ! Ici aussi je l'ai dit au plus grands. Pas facile. Les larmes sont venues. Mais il fallait qu'ils sachent. Pour moi, c'était important. Et hier, nous sommes allés marcher tous ensemble dans les rues de notre ville.
RépondreSupprimerAs-tu également expliqué a tes enfants la tuerie de l'hypercacher?
RépondreSupprimerIls sont morts pourquoi maman? Qu'avaient-t-ils fait? Des dessins moqueurs? Faisaient-t-ils respecter l'ordre? Non mon fils ils sont morts juste parce qu'ils étaient juifs....