Je ne sais pas comment commencer cet article. Probablement parce que j'ai mille choses à dire sur le sujet, parce que j'en ai fait du chemin, qu'il en reste beaucoup à faire dans l'acceptation de soi, de son corps, des transformations et des changements qu'il a pu subir, de sa couleur, de sa texture, de son souvenir, de sa douleur, de sa souffrance, de sa douceur aussi, de son histoire. J
'en avais parlé là, de mon chemin pour retrouver un corps qui ne me fasse pas souffrir, tant physiquement que moralement. Je n'ai pas la taille mannequin, mon IMC est normal, c'est ce que je voulais. Je cours sans (trop) décéder et je peux porter des jupes sans me sentir boudinée. Je me sens bien, même si la plupart des #regimeuses qu'on voit fleurir sur Instagram, partent de mon poids actuel pour arriver 10kg en dessous. Je me sens bien.
J'ai lu hier un article. Que j'ai partagé et j'ai vu qu'à vous aussi, il vous faisait quelque chose.
Je ne fustige par l'auteur de cet article, elle est superbe, elle fait du coaching sportif, elle doit ressembler à ce que ses clientes attendent d'elle.
Elle n'est pas la seule d'ailleurs, à avoir pignon sur rue et à promouvoir le sain, le bouger, le "tout le monde peut le faire, bougez vous le cul".
Elles s'appellent Kayla, Sonia, ont un corps de déesse (23 ans ça aide), ont du fric, du temps et cette motivation sans faille.
Je m'appelle Marie, j'aurais 34 ans le mois prochain, je dors par tranches de deux heures environ, réveillée par mes enfants (souvent la même, je vous vois venir), je me lève au radar, je prépare les petits-déjeuners, je houspille, ils s'habillent, on est en retard, on fonce, je porte d'un bras (oui j'ai mal au dos), je donne l'autre main. Je distribue les bisous. Je fais coucou de la main.
Je rentre d'un bon pas. Parce que j'ai la chance de travailler chez moi.
Je débarrasse la table, je lance une lessive, un coup d'aspirateur, je plie du linge, je me prends un thé et je vais bosser, sans lever la tête, jusqu'à l'heure du repas. Je fais à manger ,je vais les chercher, on mange, on joue, on repart. Je rentre de nouveau, linge et chambres aérées. Je bosse, sans lever la tête, jusqu'à l'heure du goûter.
On goûte, dehors si on le peut. On rentre, fourbus, j'ai tenu des mains, fait des pains-chocolat, j'ai secouru des enfants bloqués en haut du toboggan.
On fait les devoirs, on m'appelle partout. Je tente de faire apprendre des mots mais Ariel est coincée dans le four de la petite cuisine.
Je vais faire pipi, on me récite une poésie devant la porte et je corrige "n'oublie pas de dire toutes les syllabes".
Je fais couler le bain, tandis qu'on révise la leçon sur les verbes. Il écrit ses temps pendant que je délivre Belle (qui bloquait Arien dans le four). Je calme une hystérie collective (pour un légo volé). Je ramasse des livres, tombés.
Je vérifie les cahiers de liaison et hurle "oui tu peux aller au bain".
Je signe et assure "oui, tu peux couper l'eau".
J'apporte les serviettes, je répète que les pyjamas sont sur les lits.
Je ramasse les serviettes et surveille le bain de la plus petite.
Je regarde ce qu'on fait à manger, je prépare pendant que ça chahute.
Je grignote évidemment, je n'ai rien avalé depuis le repas express de midi (durant lequel je fais le service en tentant de manger une pâte par-ci par-là).
Je grignote en culpabilisant déjà, parce que ce n'est pas bien, pas healthy, que c'est mal. En tête, des injonctions : tu ne grignoteras pas, prends plutôt une poignée d'amandes à 16h30. A cette heure-là, je n'y pensais pas.
Ils mangent et je picore, je meurs de faim. Je n'ai pas pu aller courir ce soir, je devais mais il pleut des cordes. Ou bien je devais mais le Mâle croule sous le boulot. Ce ne sont pas de fausses excuses, c'est la réalité.
J'ai faim mais non, Lucile, je ne mange pas avec eux parce que bien souvent, le repas du soir, c'est notre demi-heure à nous deux avec le Mâle. Entre le coucher des enfants et la crise de Nano.
Il débarasse et je lis les histoires, il promène le chien pendant que je les couche.
Les coucher. Facile. Rituel rodé qui dure depuis plusieurs années. Et la lassitude certains soirs, après une journée passée à courir, à regarder sa montre, à se dire "je n'ai le temps de rien".
Ils sont couchés après histoire, chanson, et "au lit maintenant, c'est l'heure des grands".
Ils sont au lit et il faut que nous mangions, la même chose qu'eux ou autre chose. Et si on prenait la facilité? Parce que refaire à manger, il y a des soirs où j'ai la flemme. Parce que parfois, on s'en fout de ce qu'on mange. On veut juste manger. Alors oui, pain fromage vin et on parle.
Alors oui, crème au chocolat de la laitière parce que BORDEL, la journée a été dure.
Oui.
On débarrasse, on sait que demain, le premier geste du réveil ne sera pas 30 minutes de stretching postural mais un lave vaisselle à vider.
On se vautre (je cite un commentaire de l'article) dans la paresse en se collant dans le canapé.
On (je cite toujours des commentaires de l'article) fait "comme ces bonnes femmes qui n'ont le temps de rien et qui vont passer une heure sur FB ou Twitter".
OUI.
On fait un truc qui ne demande pas d'énergie.
On se met en mode "repos".
Et cette petite voix qui nous traite de feignasse, on l'a déjà en tête. Inutile de nous la balancer en pleine tronche.
Et pourtant.
Je cours deux fois par semaine.
Je fais du vélo d'appartement si je ne peux pas aller courir, pour éviter de crier sur les mômes.
Je fais du gainage parce que ma kiné m'a expliqué que j'aurais toujours mal au dos si je ne récupérais pas un brin ma ceinture abdominale.
Je fais du sport pour moi, pour ma santé, pour pouvoir continuer à vivre sans devenir hystérique.
Mais JAMAIS, jamais, je n'oserai dire "vous pouvez si vous voulez".
C'est faux.
Le sport c'est personnel.
C'est ce que nous disons aux enfants d'ailleurs. Nous vous sortons parce que c'est notre rôle de parents. Nous allons marcher, nous allons à la piscine, nous allons nager et skier. Nous allons dehors tous les jours parce que ça fait partie de ce que nous voulons vous transmettre et que c'est important pour vous et votre santé. MAIS JAMAIS JAMAIS vous ne serez forcé de choisir une activité sportive à côté de manière obligatoire. Le sport, c'est du plaisir. Si c'est pour y aller en pleurant, en râlant et en étant malheureux, ce n'est plus du sport.
Moi aussi je veux un ventre plat. Sans cet aspect grumeleux moche que j'attrape de la main entière et qui reste là, malgré la perte de poids, malgré ce que je peux faire;
Moi aussi je veux des cuisses fuselées et pouvoir porter un mini-short sans avoir ce petit morceau de peau-grasse.
Mais c'est marrant, au delà de tout ça, une chose s'impose à moi : la réalité.
Je ne peux pas mener tout de front, je ne PEUX PAS.
Je ne peux pas travailler, gérer mes mômes, écrire un bouquin, monter ma boîte, faire les courses et le ménage. Je ne peux pas. Et vous savez quoi? Ce n'est pas grave.
Ce qui est grave, c'est de dire aux autres :
bien sûr que vous pouvez.
Non.
Faites donc. Mais foutez nous la paix.
On fait comme on peut.
Je choisis de ne pas me lever à 5h30 pour aller faire mon TBC ou tout autre challenge quotidien.
Je choisis de manger une raclette dimanche. Et une fondue mardi.
Je choisis parce que j'ai passé l'âge d'obéir aux injonctions des autres.
Et à vous lire, hier soir, à rire (j'ai ri mais ce que j'ai ri), je me suis dit que nous n'étions pas si foutues que ça, que nous n'étions pas si nulles que ça, comme si le corps parfait pouvait être, en soi, porteur d'une quelconque valeur sur ce que nous sommes.
Alors oui, son blog s'adresse aux femmes qui veulent un coaching musclé pour perdre du poids. Oui.
Mais elle a pignon sur rue et elle s'adresse a priori le matin dans une émission destinée à toutes les mamans.Elle a raison, évidemment, on n'est rien que des grosses feignasses à dire "oui j'ai des kilos de grossesse, ma dernière à deux ans".
Elle a raison. Elle est coach, c'est son métier de booster les gens, de leur crier éventuellement dessus des choses qui lui paraissent évidentes.
Les kilos de grossesse, ce n'est pas une excuse.
Mais merci, les femmes mettent derrière les kilos de grossesse tout ce qui n'existait pas avant. La course permanente, le manque de sommeil, surtout le manque de sommeil. Probablement que les enfants des coachs sportifs n'ont ni reflux, ni maladie digestive, ni cauchemar. Si on était venu me dire quand Nano hurlait de douleur jusqu'à 2h du matin "bah tu peux faire des squats pendant qu'elle est dans l'écharpe" je pense que j'aurais été violente (et un brin détruite).
Ne mélangeons pas tout.
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Merci Papacube (parce qu'il vaut mieux en rire nan??) |
Nous ne sommes pas égales devant la maternité. Certains bébé font leur nuit directement, certains papas se lèvent toutes les nuits pour que leur chère et tendre soit reposée le matin (Coucou Georges).
Certaines femmes vont perdre du poids grâce à l'allaitement, d'autres vont en prendre.
Certaines femmes vont avoir des vergetures indélébiles et ranger les maillots, d'autres vont pouvoir arborer le bikini dès l'été suivant.
ET?
Qu'on nous laisse être, par pitié.
Qu'on nous laisse nous plaindre un peu, sans nous dire "si tu voulais, tu pourrais, regarde les avant-après de Machine qui, après trois enfants, a un corps encore mieux qu'avant".
Tant mieux pour elle.
Je n'ai pas cette chance.
Et je suis très bien avec ce constat.
Ne pas faire de nos corps une généralité, ne pas faire de nos prises de poids un modèle applicable à tous.
Je peux me priver.
Je peux faire du sport 30 Minutes par jour, il suffirait que je ne lise plus et que je prenne une femme de ménage et/ou une aide pour faire faire les devoirs aux enfants. Ou que je mange vers 22h.
Je peux suer dans mon salon et me prendre en photo pour voir l'évolution.
Je me connais, ça durerait 5 semaines au mieux. Et je compenserais ensuite.
Adieu ventre-devenu-un-peu-mieux-et-bonjour-déprime.
Je ne critique pas celles qui le font. Tant mieux, bravo et courage.
Je ne critique pas et j'ai tenté, je l'ai le Bikini Guide mais je me suis arrêtée à la Week 4 parce que je trouvais ça un peu violent les relevers-couchers sur un périnée de maman.
J'ai tenté mais j'ai échoué.
Comme Dukan, les avant-après ne sont pas pour tout le monde.
Mais c'est l'échec dont on ne parle pas. Les réussites sont louables.
Et les autres?
Celles qui n'y arrivent pas? Celles qui se blessent (parce que les exercices sont souvent mal faits, à la maison, sans regard d'un vrai pro)? Celles qui abandonnent par manque de temps, d'énergie et de motivation? Celles qui sortent de la #team ? Elles deviennent quoi? C'est de ça dont je parle.
De toutes celles qui
osent se remettre en question à cause de ces injonctions, de ces images, de ces modes très "réseaux sociaux" d'ailleurs.
On ne devrait pas parler comme ça aux femmes. On ne devrait pas. Je vous renvoie d'ailleurs sur la superbe initiative du blog
Le Corps des Femmes. De la bienveillance à l'état pur.
Je ne sais pas si c'est parce que je vieillis (si si). Ou si c'est parce qu'enfin j'ai détaché de mon corps le psychologique, je n'utilise plus mon corps comme instrument de ce que je suis mais comme partenaire de ce que je fais.
Je comprends les régimes. Vraiment. J'en ai eu besoin pour me retrouver, pour pouvoir monter des escaliers sans galérer, pour pouvoir me sentir mieux.
Mais je ne comprends pas qu'on parle comme ça aux femmes, qu'on parle comme ça aux mères.
Le poids, notre poids, fait aussi partie de ce que nous som
Il est notre histoire, il est notre vie. Personne ne peut, comme je l'ai lu, me traiter de "bonne femme vautrée dans la paresse qui n'arrive pas à faire 30 minutes de sport par jour et qui se plaint d'être grasse".
Oui, j'ai mal à mon ventre abîmé.
Oui, je voudrais bien entendu pouvoir le montrer.
Oui, ça me fait mal de voir des femmes avec un ventre parfait poser à côté d'un bébé d'à peine un an.
Oui je me projette. Oui je me dis "tu vois, tu ...".
Et je me reprends et non.
Non. Qu'on ne me dise pas "tu es une merde parce que si tu le voulais, tu pourrais y arriver".
J'ai toujours prôné la bienveillance, ça ne risque pas de s'arrêter.
Que cette brutalité s'arrête, merci.
Nous les mères, nous les pères, en avons assez.
Qu'on nous laisse nos vies, nos assiettes, nos corps, même abîmés, et nos façons de penser.
Qu'on nous laisse juste vivre, sans nous indiquer la route.
Nous saurons très bien la trouver.